La bonne gouvernance, la paix et le développent sont trois composantes interdépendantes d’une société apaisée. Mais celle-ci ne peut durablement prospérer que si et seulement si elle respecte certains principes et valeurs dont la démocratie, l’indépendance de la justice, l’éradication de l’impunité, le culte de l’effort et du travail bien fait, … Une telle société doit rester enracinée dans la culture du progrès, qui fait partie des « Objectifs de Développement durable ». Complétons cette conviction pour dire qu’il faut aussi cultiver dans cette société le respect réciproque, l’exemplarité, la transparence et le culte de la vérité. “L’anticipation pour l’action, via l’appropriation” adoptée comme principe de bonne gouvernance et intégrée dans la conscience des citoyens de cette société sera d’une grande utilité. 

Pour des actions efficaces et efficientes il importe de poser la question de savoir sur quoi faudrait-il orienter la réflexion, l’appropriation et l’action prospectives qui pourront donner lieu à la Gouvernance d’être bonne, démocratique, transparente, efficace. A vrai dire on est encore bien loin de ce stade idéal qui n’est pour le moment qu’un rêve, même dans les pays développés, dits démocratiques.

La bonne Gouvernance ne peut se contenter de résultats économiques au mieux mitigés comme dans nombre de pays africains ; la Gouvernance démocratique ne peut s’arrêter à la seule organisation d’élections présidentielles ou législatives, fussent-elles libres et transparentes, la vie d’une nation ne s’arrêtant pas aux seules périodes électorales. Encore que c’est quasiment impossible de voir au monde des résultats d’élections en rien non contestables. On peut dire que les élections contestées sont un des rares et tristes domaines où l’Afrique ne détient pas le record. De la pertinence et de la cohérence de la réponse à cette question (sur quoi focaliser la réflexion prospective ?) dépendent la motivation et la mobilisation collective pour l’action, l’adhésion et l’implication de chaque acteur et de tous concernés par la Gouvernance perçue comme bonne, démocratique, ou au contraire mauvaise.

Dorés et déjà nous pouvons affirmer à la lumière de l’expérience des pays africains, qu’il faudrait prendre ses distances vis-à-vis de ces idéologies importées et du discours véhiculé çà et là qui ne donnent que de fausses pistes du développement économique de l’Afrique, par ignorance ou à dessein. Ce discours ne met nullement l’accent sur l’essentiel, n’abordant que très rarement et légèrement les vraies questions, à savoir le développement de compétences adaptées et la création de richesses, la transformation industrielle par les Etats africains de leurs matières premières et leur libre commercialisation, la dimension écologique du développement ignorée par les multinationales qui surexploitent les ressources du continent, le financement de la lutte contre la malnutrition qui génère de graves maladies et accroît très sensiblement le taux de mortalité notamment chez les enfants, la promotion des valeurs et langues nationales comme socle et vecteur du développement… Décoloniser l’imaginaire africain est un autre idéal. Décentraliser, simplifier et moderniser l’administration, préserver de bonnes relations de coopération d’égal à égal avec tous les partenaires  économiques sont d’autres exigences cruciales. C’est précisément sur ce genre de questions que devra porter l’analyse prospective de la bonne gouvernance en Afrique. C’est là le vrai débat des intellectuels africains.

Un modèle de développement porté par des valeurs étrangères n’a point d’avenir ; il pose toujours des problèmes d’appropriation et d’intégration, et donc d’implication collective des acteurs, et d’efficacité de leur action. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut tout rejeter dans la culture d’autrui. Certainement cette autre culture recèle des éléments positifs pouvant enrichir les réalités africaines, autant que celles-ci peuvent bien être utiles aux autres cultures. C’est cela la civilisation de l’universel (L. S. SENGHOR), une forme de civilisation interculturelle, une symbiose culturelle tant prônée pendant  les années dites d’indépendance de l’Afrique. Voilà brièvement soulignées quelques unes des importantes questions qui se posent à la Gouvernance dans le contexte géopolitique actuel de l’Afrique. Il est évident qu’un diagnostic plus approfondi de cette question dans le cadre d’une étude prospective permettrait de mettre à nu bien des problèmes incompatibles avec une gouvernance bonne, démocratique et garante d’une paix durable pouvant propulser le développement économique. 

La bonne gouvernance, la paix et le développement prennent racine dans le respect des droits du peuple souverain ; ce sont des droits de l’homme et des peuples, ce sont des devoirs pour les gouvernants qui doivent non seulement les respecter, mais les faire évoluer sur la base de politiques fondées sur l’anticipation des changements, l’appropriation par le peuple de ces changements et de leurs effets, et sur l’action éclairée et dynamique.